Coriolis infinitus dans « Vortex en série » un article de Charlotte Montpezat / Huffligton post, 06/09/2015

Vortex en série / Charlotte Monpezat

Vous, je ne sais pas, mais moi, je vois des Vortex partout. Signe du chaos qui semble secouer le monde et que l’on souhaite comprendre, voire organiser? Sans doute. En tout cas, de Anish Kapoor à Nicolas Tourte en passant même par le récent Mission Impossible, les images du moment font volontiers tourner la tête.

Alors, un Vortex, c’est quoi? Et bien c’est d’abord l’acronyme Verification of the Origins of Rotation in Tornadoes EXperiment. Donc une histoire de fluides qui tournent sur eux mêmes et qui permettent de comprendre les tornades et les tempêtes. Formellement, on n’est pas loin des siphons, des trombes, de tous ces mouvements concentriques qui attirent et font peur en même temps. Aspirationnel. Surtout pour les artistes.

Descension, le vortex d’Anish Kapoor dans les… par LeHuffPost

Coriolis Infinitus

Coup d’envoi avec le plus doux et le plus poétique des Vortex du moment, celui présenté par Nicolas Tourte à la galerie Laure Roynette. Dans cette vidéo ronde, encastrée dans un support carré très légèrement bombé, comme pour être plus doux, la pupille est noire, fixe et centrale, pendant que l’iris s’enroule comme un vortex marin, bleu, frais et tempétueux. Vision réflex(ct)ion et embarquement immédiat pour les tempêtes de l’âme et leurs abysses: on plonge direct.

Nicolas Tourte ayant récemment tapé dans l’œil de la Maison Hermès, on verra bientôt ses œuvres chez eux. En attendant, il fait également partie des artistes qui constituent le parcours St Germain en octobre.

Changement d’ambiance. Versailles (enfin… ce n’est pas la première mise en place de l’œuvre, mais bon…), l’expo événement de Kapoor, l’incontournable Dirty Corner, des miroirs qui tutoient le ciel et… un vortex pour nous plonger dans les entrailles de la terre en guise d’adieux. Là, les eaux sont noires, le grondement de l’aspiration est puissant, menaçant et attirant. L’oeil était dans la t(r)ombe, pour le coup et nous renvoie tous à notre statut de Caïns. Allez hop, un peu d’introspection avant le plongeon.

Au-delà des Vortex en bonne et due forme, il y a des near-Vortex. Des formes en creux qui obligent le regard à plonger. Une sorte de rapt formel des yeux.

A observer de près à partir du 3 octobre prochain, les spirales de Berdaguer et Péjus (lauréats de la fondation Paul Ricard et récemment exposés au palais de Tokyo) installées à la Maréchalerie du château de Versailles. Les artistes entendent y présenter “un dialogue entre trois oeuvres qui entraîne le visiteur au sein d’une spirale temporelle et spatiale : “Centrale Spirale”. Ça ne vous aurait pas des airs de Vortex cette affaire ?

A voir notamment la vidéo Timezone, dans laquelle un danseur remonte le temps en arpentant un tas de sable dans le sens des aiguilles d’une montre. Hypnotisant.

Il y a les lits de Lili Reynaud-Dewar aussi. Honnêtement, je ne sais pas où on peut les voir en ce moment, mais ils étaient exposés il y a un an environ par Kamel Mennour, rue Saint André des arts à Paris. Deux lits, partie d’une exposition-installation plus large, qui présentaient chacun une béance abyssale ultra problématique, non?

Bon, je dois dire qu’en plan rapproché, il y avait quand même un truc un peu phallique qui faisait inversion de vortex. Passons.

Rebondissons sur Caroline Corbasson (oui, encore) et ses séries Storm et Holes, en dessin et vidéo. Là non plus, on ne sait pas très bien ce qu’il y a au milieu du fond du trou, mais c’est fluide et ça se précipite vers le bas. Difficile de résister…

Last but not least, en forme de madeleine de Proust ou de “meilleur pour la fin”, cette oeuvre déjà un peu ancienne du britannique Petroc Sesti, l’Elan Vital, présentée à l’espace Vuitton de la rue de Bassano lors de la formidable exposition Turbulence. Une trombe en bonne et due forme, captive à l’intérieur d’une sphère de verre. Exploit scientifique réel, cette œuvre d’art, toute en poésie et mystère, organise et sublime le chaos. Repos.

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